Sur le seuil, avec beaucoup d'ombre dans le dos
Je n'en finis pas de regarder une rose.
C'est la dernière de l'été. Ma mère aimait cette chanson.
Il m'est resté quelque chose d'elle dans l'automne
Comme « soyez heureux » ou « amitié d'un convive absent »
Je n'en finis pas de poser comme sur une photographie
Avec un chien à mes pieds.
On reconnaît le pied de vigne, le géranium,
L'entaille au coeur qui marque la saison
Comme autrefois lorsque nous grandissions
Ces dates et ces traits cernant nos tailles juvéniles.
Je n'en finis pas de poser pour retrouver un jour d'hiver
Ce qui fait vivre éternellement ce qui dure peu :
Le pas du voisin sur la route, le chant de l'électrophone
Qui part du coeur de l'été blessé.
Et dans les marges de ce soir blanc s'approchent
Les phalènes, les champs lunaires indivis,
La paix descendue du haut des peupleraies,
Brusque présence
Qui fait taire pour un instant
Toutes les bêtes de la nuit.
La vallée des rois . L'arrière pays.
Jean Malrieu .