L'autofocus à détection de contraste (CDAF ou "Contrast Detection Auto Focus") a un fonctionnement três différent de celui à détection de phase ("PDAF").
Il procède comme suit, tout d'abord côté capteur et processeur:
- échantillonnage continu d'une zone rectangulaire du capteur. La zone peut être définie en taille ou en position sur toute la surface du capteur (sur le G3) ou sur une zone limitée.
- une fonction heuristique est appliquée à l'échantillon prélevé. Cette fonction attribue une "note" absolue, qui détermine le taux de contraste de la zone sélectionnée. Notons que cette fonction est très évoluée, avec des algorithmes de détection des formes, des visages, etc..
ces deux opérations sont effectuées en flux continu, et permanent tant que l'AF est actif.
Cela signifie plusieurs choses déjà à ce stade:
- il faut une fréquence d'échantillonnage suffisante pour capter les phénomènes dynamiques (sujet en mouvement, variations de luminosité, changement de cadrage ou de la zone de mise au point).
- il faut une puissance de traitement suffisante (débit de traitement) pour produire une fonction heuristique la plus précise possible.
- la taille de la zone d'échantillonnage détermine évidemment la qualité du résultat obtenu: plus la zone est grande, plus le risque d'avoir un objet "parasite" dans le champ augmente, cet objet présentant un meilleur contraste globalement que le sujet réellement visé.
- c'est très différent d'un système PDAF qui lui ne vise qu'un point et non une surface, je reviendrai sur les conséquences plus tard.
- notons enfin que la qualité de cette fonction est directement liée à la puissance de traitement de l'électronique de l'appareil. La Loi de Moore garantit une évolution rapide dans ce domaine (la puissance double tous les deux ans).
Ensuite le boitier communique avec l'objectif, qui va faire bouger son moteur en fonction des ordres donnés.
Il s'agit d'une boucle d'asservissement. D'un côté nous avons une mesure de feedback (le procédé décrit plus haut) de l'autre un procédé analogique (moteur d'autofocus).
La commande du moteur va se faire en continu, via une régulation classique, par exemple un PID:
(je simplifie un peu, en réalité il y a quelques détails supplémentaires mais sans importance ici)
E(s) = consigne du boitier donnée par le processeur (*)
H(s) = fonction de transfert du moteur de l'objectif
S(S) = mesure du contraste, donc une note arbitraire et absolue
les autres fonctions sont calculées en fonction de ces 3 données.
(*)Cette consigne, en l'absence d'une valeur optimale connue, sera soit "avancer à fond" ou "reculer à fond", là aussi une fonction heuristique est appliquée au départ, en prenant plusieurs paramètres (est-on déjà à fond, plus de la moité, etc..)
Le but étant d'avoir un verrouillage d'autofocus le plus rapide possible, sans overshoot, ni trop de lenteur.
Le système CDAF reposant sur une fonction heuristique absolue, il n'y a pas de point de référence pour déterminer la valeur optimale.
Un léger overshoot est donc désirable: une fois la valeur optimale dépassée, le processeur la mémorise et donne l'ordre au système d'asservissement de se verrouiller dessus.
Dans l'idéal, le dépassement durera le temps d'un échantillon, soit 1/60s sur les GH2 et G3, et 1/30s sur les autres appareils.
Le réglage de la boucle PID décrite ci-dessus permettra d'obtenir ce comportement précis:
La courbe en vert décrit le comportement idéal, la courbe noire décrit un système avec un overshoot trop important (qui entraine des oscillations), la courbe en rouge un système trop lent.
Un système bien réglé passera donc *toujours* par la valeur optimale avant de se verrouiller dessus.
Cependant, si le sujet bouge en profondeur, le système CDAF ne peut pas savoir dans quelle direction il bouge (vers le photographe ou pas): là aussi, la fonction heuristique qui détermine le premier ordre à donner est très importante. Avec un pure fonction aléatoire, il a 50% de chances d'avoir juste (et donc 50% de se tromper).
Un système PDAF utilise une mesure de déphasage du rayon lumineux incident sur un point donné (*). Cette mesure est celle qui diffère du système CDAF. Cela a pour conséquences:
- il peut "prévoir" dans quelle direction un sujet bouge
- la valeur optimale étant connue à l'avance, le système d'asservissement est plus simple à mettre en oeuvre, et évite d'avoir un overshoot: on peut atteindre la valeur optimale sans avoir à la dépasser (**)
- il dépend énormément de l'éclairage du point considéré pour la mesure. D'où les faisceaux "AF assist" très puissant qui équipent les DSLR..
- il faut le calibrer proprement en usine: la mesure de distance en fonction du déphasage est une mesure absolue, ce n'est pas un télémètre.
- l'asservissement se fait sur cette mesure ponctuelle, qui est donc dépendante de la calibration de l'appareil.
Le dernier point est la grosse différence avec un système CDAF: n'ayant pas de feedback sur la qualité de sa mise au point, il dépend intégralement de sa calibration.
Si celle-ci vient à dévier, l'appareil fera systématiquement la MAP devant ou derrière le sujet.
(*) je simplifie pour le sujet ici, bien sûr les appareils modernes utilisent plusieurs points, qu'on peut activer/ désactiver à loisir, mais cela ne change pas la différence majeure entre les deux systèmes
(**) là aussi, c'est un réglage du boitier, et de l'objectif: si un des deux est mal réglé, il va y avoir une déviation...
En pratique, un exemple de PDAF mal réglé (tests de précision d'AF sur un sujet commun, le pourcentage est le nombre de photos "justes" par rapport au total):
K-7 with DA* 55/1.4: 25 %
K-7 with FA 50/1.4: 7.5 %
A700 with 50/1.4: 45 %
GF1 with 20/1.7: 80 %
GH2 with 20/1.7: 87.5 %
Les chiffres viennent de lenstip, c'est une mesure de labo donc calibrée et répétable.
Un point de vue intéressant (5Dmk2 et GF1):
http://forums.dpreview.com/forums/read.asp?forum=1041&message=38232673
Pour faire court:
- le CDAF peut être trompé si un objet mieux contrasté que le sujet est pris en compte dans la zone de focus
- le PDAF peut être trompé par un manque de lumière, ou une manipulation du faisceau lumineux (réflexions, réfraction, polarisation..)
- le PDAF doit impérativement être calibré pour les conditions lumineuses, et pour le couple objectif/boitier
- le CDAF est automatiquement asservi sur la qualité de l'image obtenue: pas besoin de calibration. Il sera automatiquement plus précis.
- le PDAF sera plus précis avec un ouverture FAIBLE, car il positionnera bien le sujet au centre de la zone de netteté (s'il est correctement calibré bien sûr)
- le CDAF sera plus précis avec une GRANDE ouverture, car l'heuristique de mesure du contraste donnera un optimum bien mieux défini avec une variation plus rapide.
- le PDAF est plus précis sur des sujets en mouvement dans l'axe de visée.
Dans les deux cas, la qualité de la mesure va se dégrader en conditions difficiles, mais pas dans les mêmes cas. En basse lumière, le CDAF trouvera son compte sans problème s'il trouve du contraste quelque part.
Des questions ? S'il faut des explications sur certains termes n'hésitez pas
PS: je me suis relu très rapidement si j'ai dit une connerie n'hésitez pas non plus !!